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Camille Balzinger

Le Québec, terre de promesse


Voici un peu plus d’un an que j’arrivais au Québec pour étudier à l’Université de Montréal. À moi l’Amérique du Nord, la poutine et la vie légère promises par l’expatriation au pays qu’on cite si fréquemment comme modèle de démocratie et de bon-vivre. Puis, en 2017, après que les tout-juste-diplômés du secondaire en France ont été pour beaucoup refusés dans leur orientation de prédilection, l’Université de Montréal leur promettait un avenir brillant et des études incroyables outre-Atlantique. Pourquoi le Canada, ou surtout le Québec, attire-t-il tant les français ? Puis, quel impact cela a-t-il sur le pays, la région d’accueil ?


Je ne parlerai que de ce que je connais et de ce dont l’internet peut m’abreuver. On peut penser à priori que l’augmentation, dès septembre 2015, des frais de scolarité au premier cycle pour les arrivants français aurait freiné leur engouement pour l’expatriation au Québec. Que nenni ! À l’hiver 2016, l’Université comptait pas moins de 2 815 inscriptions d’étudiants français, exclusion faite des échanges. En cause est peut-être le taux de change entre le dollar canadien et l’euro ; le coût de la vie pour un étudiant financé par ses parents revient probablement au même qu’il reste en France ou s’en vienne au Québec, et ce malgré les frais de scolarité bien plus élevés ici.


La promesse faite par l’Université de Montréal sur sa page d’accueil était efficace et faisait envie : on était invités à découvrir les « possibilités qu’offre un système universitaire différent, qui s’adapte à la situation de chaque étudiant ». Il est vrai que le système universitaire ici donne aux étudiants une liberté qu’ils n’ont pas en France. Là-bas, le nombre d’heures passées assis sur les bancs d’un amphithéâtre bondé d’autres étudiants dépasse souvent les 20 heures, ce à quoi s’ajoutent les heures de travaux dirigés (sessions d’une heure trente en petit groupes), et les heures de travail personnel. En France, en première année de droit, il y a fort à parier qu’un professeur vous dira que seul un cinquième vos voisins sera effectivement diplômé. Niveau bienveillance, on a vu mieux. Si un passage du cours vous a échappé, aller voir la professeure en fin de classe mènera souvent à un conseil d’écouter mieux la prochaine fois, ou encore celui de demander à vos copains de vous expliquer ce qui n’est pas clair. Rien à voir donc avec la promesse d’un suivi et d’une liberté de choix offerte par l’UdeM. Un bon point pour cette dernière, et un argument pour venir s’établir ici. Ajoute à ça le fait qu’au niveau du droit, les équivalences Québec/France sont nombreuses et faciles, plus rien n’empêche de venir ici.


Alors venir au Québec est facile : on y parle français, on s’y sent bien, l’ambiance est souvent accueillante et conviviale – sortez un plan dans les rues de Montréal et plusieurs passants s’arrêteront pour vous indiquer votre chemin. Mais venir au Québec lorsqu’on a grandi en France peut aussi s’avérer plus compliqué qu’il n’y paraît. Un grand arrivage d’expatriés français monte des pièges dans lesquels il est compliqué de ne pas tomber. On est beaucoup – c’est facile de s’entourer de français, c’est facile de ne pas s’intégrer, c’est facile d’évoluer dans un environnement quasi exclusivement similaire à celui qu’on aurait eu si l’on était restés en France. Un peu comme une bulle. Ajoute à ça le fait que personne ne te dira avant que t’arrives que payer un loyer de 700 dollars pour une chambre en colocation, c’est beaucoup trop, et qu’en faisant ça tu participes à l’augmentation des loyers pour tout le monde.


Éventuellement, il serait peut-être bien de commencer à signaler que, comme lorsqu’on s’en va habiter n’importe où sauf chez soi, le processus d’intégration doit rester le même. Lorsqu’on parle de deux pays, on parle forcément de deux cultures, de deux sociétés, de deux parties du monde à l’histoire et au passé différents. Si le Québec a énormément à offrir aux nouveaux arrivants, peut-être est-il du devoir de l’Université de leur donner quelques outils pour préparer une intégration douce et pérenne.

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