top of page
Antoine D. Hendrickx

Soldat de la vieille légion

Legio Patria Nostra


Ah! la légion étrangère, repaire de durs à cuire et d’anciens taulards! Si vous avez regardé le traditionnel défilé du 14 juillet jusqu’à la fin, vous avez surement aperçu une troupe de barbus aux képis blancs, armés de haches et vêtus drôlement d’un tablier brun. Vous avez été spectateur du pas de la légion étrangère, corps de l’Armée française au passé et au présent sulfureux et aventurier. Ceux qui me connaissent bien savent que j’admire l’Armée française en général, mais j’aime tout particulièrement ce corps à cause de son histoire, ce qu’il représente, son code d’honneur, son dévouement au service de la patrie, etc. Tradition familiale de service à la patrie oblige, j’ai acquis cette admiration. J’aimerais aussi partager l’histoire et l’orgueil de la Légion étrangère aux chers lecteurs du Pigeon Dissident, anciens comme nouveaux venus à la Faculté.


La « Vieille » Légion


L’épithète « Vieille Légion » provient plus de la perception temporelle des légionnaires lors de leur service que du véritable âge de la Légion. En effet, le temps à l’armée paraît plus long, encore plus lorsqu’on est déployé et en proie à une mort inattendue. La Légion fut créée en 1831 à l’initiative du ministre de la Guerre d’alors, le Maréchal Soult, ancien maréchal d’Empire. À cette époque, la France est dans les débuts de la conquête de l’Algérie. Comparée à d’autres corps de l’Armée française, la Légion, bien qu’aujourd’hui centenaire, fait office de nouvelle venue. Par exemple, le 1er régiment d’infanterie, le Régiment de Picardie, fut créé en 1479 et subsiste toujours. La Légion entre néanmoins en action en Algérie à l’orée des années 1830. Alors que les armées françaises régulières sont habituées aux terrains de bataille européens, en Algérie il faut se battre dans le désert et dans les djebels. La Légion étrangère va donc être dès ses tout débuts entrainée et formée à combattre sur des terrains difficiles et inhospitaliers. Des plaines désertiques d’Algérie jusqu’aux terres arides mexicaines en passant par les rizières du Tonkin, la Légion et les légionnaires deviendront des experts en combats sur terrain difficile. La Légion prit part à tous les conflits de la France. De l’expédition mexicaine de Napoléon III au cours de laquelle la Légion forgea véritablement sa légende et des deux guerres mondiales jusqu’à la guerre d’Indochine et d’Algérie, les légionnaires furent lors de tous les combats fidèles à leur réputation de témérité et d’audace.


Maintenant, il est temps de parler des hommes qui forment la Légion, car la Légion ne serait rien sans ses fidèles légionnaires. En 1831, le but même de la création du corps d’armée fut d’incorporer des étrangers désirant servir dans l’armée française. Bien que sous l’ancien régime notamment, la France possédait des corps de volontaires étrangers, comme des Suisses ou des Écossais, la Légion innove en acceptant n’importe quel étranger. Bien sûr, vous vous demanderez pourquoi un étranger se porterait volontaire au service de la France. Alors que de surcroit, les légionnaires étaient très souvent déployés en première ligne ou dans les missions les plus dangereuses. Eh bien, c’est simple, la Légion accordait une deuxième chance ou une porte de sortie aux potentiels légionnaires. On pouvait s’engager sous une fausse identité déclarée permettant d’échapper à des problèmes. Les premiers légionnaires étaient des bagnards en fuite, des criminels recherchés et autres durs à cuire. Un peu comme l’Australie, la Légion fut formée par des étrangers enhardis, sans peur et pleins de testostérone, à la recherche de bagarre. C’est ce qui explique la férocité et la rage combattantes qui ont fait la réputation sulfureuse et téméraire de la Légion étrangère. Ce corps d’étrangers prêts à mourir et capables d’endurer les plus atroces souffrances ont été le pire cauchemar des résistances organisées lors des conquêtes coloniales françaises. Mais contrairement à ce que l’on pourrait croire, la Légion étrangère est aussi ouverte aux ressortissants français, bien que ceux-ci doivent s’engager en déclarant une autre nationalité. Aujourd’hui toutefois, les conditions de recrutement se sont resserrées, les auteurs de crimes graves (ex : viol, meurtre, etc.) n’étant plus acceptés alors qu’auparavant ce genre d’individus prêts à tuer au combat étaient recherchés lors du recrutement. L’ouverture au monde du recrutement de la Légion fit que le corps d’armée est rapidement devenu un organe cosmopolite. Mais l’attachement et le patriotisme français inculqués lors de la formation aux légionnaires font que dans la Légion, on ne sert qu’un seul pays, la France, qu’on ne parle qu’une seule langue, le français, et qu’on n’honore qu’un seul drapeau, le tricolore français. Finalement, les légionnaires ont la possibilité de devenir français après leur service militaire et même de recevoir un nouveau nom au civil (plusieurs recherchés de la justice en ont jadis profité pour échapper à la prison ou pire). Mais que le légionnaire devienne français ou non, l’attachement à la Légion comme famille reste chez tous les légionnaires formés. À la légion, tous les hommes sont des frères par les armes et par le sang versé jusqu’à ce que la mort vienne les chercher.


Les chants de la SS


Maintenant que l’on a abordé l’historique et le recrutement de la Légion, il est temps d’aborder la plus importante des nombreuses traditions de la Légion : les chants de guerre. Le chant dans l’armée a toujours été très important. Du temps où les soldats devaient marcher au pas, on faisait battre le tambour et chanter des musiciens-soldats pour donner le rythme de marche aux hommes. Avec l’avènement de la guerre plus moderne au 19ème siècle, le chant et la musique militaire entonnés par les soldats pour se donner courage et férocité remplaça le chant du pas. Ainsi, la Légion étrangère qui était (et l’est toujours) renommée pour son courage au combat possédait sa propre gamme de chants militaires. Mais il ne faut pas oublier que la grande majorité des légionnaires n’étaient pas français. Alors que dans l’Armée française on chantait les exploits des anciens héros français ou encore des chants sur la France en péril, les chants de la Légion provenaient des pays d’origine des légionnaires. Amalgamés et adaptés en français, les chants légionnaires se référaient toujours plus à la Légion, dénominateur commun des légionnaires, qu’à une nation ou patrie. C’est pourquoi, dans la Légion, on chante majoritairement les méandres et la gloire de la Légion étrangère et non de la France, comme dans le reste de l’Armée.


Un autre phénomène intéressant à noter est que les nationalités des légionnaires varient au gré des conflits à travers le monde. La Légion connut sa période espagnole par l’afflux de combattants espagnols au recrutement après la guerre civile espagnole. De même, elle a connu sa période anglaise après les Malouines, américaine après l’Irak, serbe après le conflit yougoslave, etc. Mais de toutes les guerres, ce fut la Deuxième Guerre mondiale qui amena le plus de nouveaux légionnaires. Des milliers de soldats ou de prisonniers allemands rejoignirent la Légion après 1945, parmi eux des centaines d’anciens officiers nazis ou de la Waffen-SS fuyant la chasse aux sorcières en Allemagne. Quand je vous disais que la Légion avait un passé sulfureux, des centaines (si ce n’est des milliers) de Nazis et de SS trouvèrent refuge, sous une fausse identité, dans la Légion et purent échapper sans problèmes à la justice. Il est à noter que l’Armée américaine recruta elle aussi de nombreux anciens soldats allemands, dont des SS, dans ses rangs après 1945. Résultat : les anciens SS amenèrent leur chant adapté en Français à la Légion. Ils firent tant d’effets qu’aujourd’hui, les chants les plus emblématiques de la Légion sont d’anciens chants SS. Parmi les plus connus, je peux citer le chant « Nous sommes tous les volontaires » adapté en français de la marche allemande Bombenfliegermarsch der Legion Kondor qui a entretemps servi d’hymne à la Légion de Volontaires Français combattant le Bolchévisme sur le front Est avec la Wehrmacht durant la Seconde Guerre Mondiale. Ou encore le très masculin « Chant du Diable », hymne au courage des légionnaires, qui fut à l’origine le SS marschiert in feindesland, ou « la SS marchant en territoire ennemi », un chant composé pour vanter la férocité et la hargne de la Waffen-SS sur le front Est (sa mélodie fut composée, selon la légende, par Hitler en personne).


La Légion Étrangère n’a jamais cherché à recruter de petits soldats modèles. Tout son processus de recrutement fut construit pour attirer à elle des durs à cuire n’ayant plus rien à perdre. Il faut des hommes pour faire la sale besogne inhérente à la guerre, pas pour servir de fantassins exemplaires. Même si, aujourd’hui, le recrutement d’anciens criminels de guerre comme des SS serait impensable et que les conditions de recrutement se sont grandement restreintes, la Légion garde sa réputation de tête brulée de l’Armée Française.


Photo annexé au texte : Les légionnaires au garde à vous.


170 vues0 commentaire

Posts récents

Voir tout
bottom of page