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Anonyme

J’y ai goûté, la bière est douce-amère.



En tant que nouvelle, c’est entre l’appréhension et la déception que j’ai débuté ma première semaine en droit à l’Université de Montréal. Depuis mon admission, je ne peux calculer le nombre de fois où l'on m’a posé la fameuse question : « As-tu entendu parler du scandale sur les initiations de l’automne passé ? »


Évidemment, qui n’en a pas entendu parler?


Mais j’ai toujours vu les initiations comme un endroit où se faire des amis, où l’on peut montrer qui l’on est vraiment, avoir du plaisir et, bien que cela puisse être contradictoire pour certains, un endroit où le consentement prime malgré tout. Il n’est pas nécessairement négatif d’en faire plus qu’à l’habitude dans le cadre d’une activité si nous sommes complètement à l’aise avec ça, n’est-ce pas?


Le « sans oui c’est non » étant si présent, je ne pouvais que croire que les organisateurs avaient le consentement à cœur et qu’aucune activité ou consommation ne serait forcée chez les participants. Il faut comprendre que j’apprécie grandement leurs efforts pour faire en sorte que tous soient à l’aise lors des activités d’accueil. Le présent texte n’efface pas les beaux souvenirs que j’ai eus de ces activités d’accueil.


Toutefois, les interdictions qui nous étaient imposées étaient quelque peu frustrantes. Aucune référence à l’alcool n’était tolérée. Toute référence au sexe pouvait être sanctionnée. La consommation était pointée du doigt et les filles qui voulaient en faire davantage se faisaient jeter des regards. Je me suis sentie comme à l’école secondaire, où les manifestations amoureuses n’étaient pas tolérées, où l’alcool était un vice, mais principalement dans un endroit où l’on devait absolument s’assurer que PERSONNE de l’extérieur ne soit au courant de nos activités. Il fallait se cacher. On n’était pas à l’aise de chanter dans la rue, pas à l’aise de jouer à nos jeux dans le parc, et pourtant, ce malaise généralisé ne vient pas du jeu, mais bien de la peur d’être jugé par les gens de l’extérieur.


Vient ensuite le problème du consentement. Quelle en est la définition? Est-ce ne jamais être exposé à une activité que nous pourrions refuser de faire, ou est-ce la véritable liberté de choisir si on le fait ou pas?

À mon avis, le problème de consentement résulte simplement de la pression des autres. D’enlever tous les jeux à connotation sexuelle (comme simplement remplacer le lubrifiant par de la vaseline) a parfois été synonyme de malaise généralisé pour cause d’activités sans but. Inventer une chorégraphie et une chanson avec 3 mots complètement banals ne relève pas du défi, cela ne permet pas aux gens de se dépasser et de découvrir les autres. Les petits défis à La Maisonnée le mardi soir comme « aller chercher une olive » ou « apporter une mèche de cheveux » étaient si simples que la plupart des gens sont partis dans les 10 minutes qui ont suivi. La chorégraphie finale n’a été qu’un amalgame de participants ne sachant pas trop quoi faire sur une scène si petite qu’ils ont fini par danser n’importe comment.


J’ai vraiment compris ce qui me dérangeait mercredi, quand j’ai participé aux activités de course et de batailles sur les jeux gonflables, et que la sueur, la boue et la bière accumulée sur mon chandail me donnaient le goût de le lancer dans les vidanges. Je me suis vite fait rappeler à l’ordre, malgré le petit impact qu’aurait eu ma brassière de sport sur la journée : « C’est interdit d’enlever son chandail. On nous l’a dit dans la formation, les filles doivent garder leur chandail ! »


J’ai senti le malaise. Le slut shaming. Les filles n’ont pas le droit d’enlever leur chandail. Les gars, eux, c’est pas grave. Si une fille le fait, elle se fera réprimander, et ses boosters seront tenus pour responsables parce qu’ils n’auront pas réussi à la contrôler. Eux aussi, ils ont marché sur des œufs pendant toute la semaine, de peur d’être disqualifiés pour gagner la Spirit ou de se faire juger par les organisateurs. J’ai aussi vécu le même phénomène que j’appelle le drunk shaming, quand on s’est fait interdire de chanter « B – B – Buveur de qualité » ou « A – A – Alcoolique ». Quels yeux pleins de jugement mes boosters ont-ils reçus à ce moment-là. Évidemment, ceux qui prenaient le rôle des méchants malgré eux étaient les membres de l’AED, qui eux semblaient aussi avoir le goût de chanter, mais qui croulaient sous la pression de la Faculté et sous la peur que tout se retrouve dans les médias. Notre association a été forte, elle a respecté les balises lui ayant été imposées dans le plus grand respect des autres et des hautes instances.


J’ai même entendu parler de la peur de l’agression sexuelle, du fait qu’un tel événement nous ferait perdre notre permis d’alcool et de la pression ajoutée sur le dos d’une fille dans le cas où ça arriverait. Pourquoi? Parce qu’on a mis toutes les mesures en place pour empêcher le tout, non? Alors si ça arrive, c’est probablement de sa faute… Il est triste de voir que les règles quant aux initiations n’ont pas été respectées dans toutes les facultés de l’Université de Montréal. Je pense notamment à une certaine école dont les études élevées entraînent les étudiants à se penser si loin de l’Université, alors qu’un de leurs pavillons est directement relié au nôtre…

Je ne sais pas où est la limite, mais l’interdiction ultime est-elle vraiment la définition du consentement ? Si c’est le cas, est-ce qu’elle diminue les préjugés de notre société envers les filles et l’alcool ? Ça, je ne crois pas. Il y a malheureusement encore beaucoup de travail à faire.

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