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Marie-Christine Plouffe

L'industrie montréalaise des calèches est obsolète



Températures élevées, surfaces dures et inégales, circulation continue, chantiers de construction, heures de travail interminables… Les chevaux ont-ils vraiment leur place au centre-ville de Montréal ?


C’est en juillet 2015 que le débat concernant la présence des chevaux dans le Vieux-Montréal avait refait surface suite à la chute d’un cheval ayant glissé sur une plaque de métal dans une zone en construction. En réaction à cet accident, nombreux ont été ceux et celles qui ont remis en question la présence de chevaux au centre-ville de Montréal. Le maire Coderre avait alors réclamé un rapport sur l’état de santé des chevaux de calèche pour finalement imposer un moratoire à l’industrie en 2016 en attente de l’instauration d’un règlement municipal sur la question. Cette décision avait cependant été contestée en Cour supérieure, par les cochers, qui demandaient une injonction provisoire afin de l’annuler. On leur a finalement donné raison et cette décision n’a jamais été portée en appel.


En août dernier, un nouveau règlement concernant les calèches à Montréal a néanmoins été adopté par l’administration Coderre (Règlement sur les calèches). Présentement en vigueur, il impose de nouvelles limitations aux propriétaires de calèches ainsi qu’aux cochers. Il se dit ainsi vouloir réglementer la pratique afin d’assurer le bien-être de l’animal. Les chevaux doivent maintenant être examinés deux fois par an par un vétérinaire afin qu’on atteste de leur bonne santé, doivent être équipés d’une micropuce permettant de collecter des informations relatives à leurs activités et pourront être attelés pour un maximum de neuf heures par jour. Un temps de repos de 10 minutes entre chaque balade doit aussi leur être accordé afin d’assurer la sécurité des passagers. De plus, les propriétaires de calèches doivent cesser toute activité lorsque la température atteint les 28 degrés Celsius, alors qu’auparavant on pouvait faire travailler les animaux jusqu’à 30 degrés. En ce qui a trait à l’exploitant et au cocher, ils ne peuvent exercer s’ils ont à leur dossier une infraction criminelle de cruauté envers les chevaux ou les animaux (Loi sur le bien-être et la sécurité de l’animal), et ce, au cours de leurs cinq dernières années de service.


Il y a cependant lieu de se demander si ce nouveau règlement suffit à pallier les manques de l’industrie relativement au bien-être des animaux. Bien qu’à première vue il s’agisse d’un bon pas en avant et que plusieurs limitations imposées soient les bienvenues, certains points cruciaux ont cependant été complètement balayés du revers de la main. Par exemple, on ne mentionne rien en ce qui concerne l’âge limite auquel les chevaux peuvent continuer à travailler. De plus, aucune spécification n’est faite quant au niveau de formation obligatoire que doivent posséder les propriétaires de calèches ou les cochers. C’est en effet ce que mentionne Sophie Gaillard, avocate pour la SPCA, selon laquelle plusieurs des chevaux achetés par les propriétaires de cette industrie sont âgés de plus de 15 ans et seraient déjà à la fin de leur « vie de travail ». Elle explique qu’ils ont donc souvent des blessures préexistantes et qu’on les fait travailler jusqu’à ce qu’ils en meurent. De plus, le règlement ne mentionne rien relativement à l’exposition des chevaux aux gaz d’échappement des voitures ainsi qu’au fait qu’ils doivent travailler sur une surface dure qui ne leur est pas du tout adaptée et qui peut contribuer à leur occasionner des blessures.


Le fait qu’un cheval soit en bonne santé physique pour travailler ne signifie pas qu’il soit en bonne santé psychologique, surtout s’il a été privé de son environnement naturel pendant plusieurs années au profit d’un travail acharné dans une ville comme Montréal. Selon la SPCA, les chevaux sont attachés dans des petites stalles lorsqu’ils ne travaillent pas. Ils n’ont que très peu souvent accès à un espace ouvert pourtant nécessaire à leur santé psychologique afin de socialiser, paître et courir.


On peut donc se questionner concernant les véritables motifs derrière cette nouvelle règlementation. Vise-t-elle vraiment à assurer le bien-être des chevaux de calèche ou vise-t-elle plutôt à améliorer l’image de l’industrie froissée par les différents incidents et débats ayant eu lieu au cours des dernières années? Cette industrie n’est plus indispensable pour le patrimoine culturel et la vie touristique de Montréal. Il est temps qu’on admette qu’un tour de calèche vaut bien moins que la santé du cheval qui y est attelé.

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