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Isaac Harris

Contre la politisation des tribunaux

C’est avec horreur que je regarde le processus de sélection et de nomination d’un nouveau juge à la Cour suprême américaine. En 2016, lorsque le Président Obama a décidé de nommer Merrick Garland comme juge, le Congrès (contrôlé par les républicains) a refusé de tenir un vote sur sa candidature. Ainsi, lorsque le Président Trump a récemment choisi Brett Kavanaugh pour être juge à la Cour suprême en remplacement d’Anthony Kennedy qui a décidé de prendre sa retraite, le débat portait exclusivement sur l’aspect politique. Un constat est clair : la Cour suprême américaine est devenue un tribunal politique où les juges sont facilement identifiables comme républicains ou démocrates.


Ce constat pose un problème existentiel pour les tribunaux américains. Un des buts du pouvoir judiciaire est d’exercer un contrôle sur les pouvoirs législatifs et exécutifs qui, quant à eux, sont intrinsèquement liés à la politique. Cela donne aux tribunaux un mode d’analyse distinct dans la résolution de certains débats sociétaux. Voici un exemple concret. Il est facile d’imaginer un parlement populiste où la volonté collective de la société ne correspond pas au respect des droits de certains groupes minoritaires. Dans une telle situation, il est essentiel que les tribunaux soient détachés de la réalité politique afin d’appliquer la constitution avec justesse. Lorsque les tribunaux deviennent politisés, la séparation des pouvoirs est diminuée. Il s’agit d’une menace à la démocratie constitutionnelle.


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Nous devons également penser aux individus qui sont nommés. En d’autres mots, quels types de personnes doivent occuper des postes aussi importants que juge à la Cour suprême ?

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Dans un monde idéal, ce sont des juristes avec beaucoup d’éducation et d’expérience qui ont démontré une capacité à résoudre des conflits en utilisant les sources juridiques applicables aux cas. Aux États-Unis, M. Kavanaugh a été explicitement choisi par M. Trump parce qu’il est en faveur de la criminalisation de l’avortement. Il s’agit donc d’un choix influencé par des enjeux politiques. Il était également choisi parce qu’il est relativement jeune et donc pourra continuer à rendre des décisions conservatrices pour plus longtemps. Donc, les considérations politiques font en sorte que les personnes nommées ne sont pas nécessairement celles qui sont les plus qualifiées. Nous devons favoriser un système méritocratique où les candidats sont distingués selon leur compétence.


C’est avec force que nous devons, en tant que Canadiens et Canadiennes, dénoncer la politisation des tribunaux. Le système américain est un modèle à ne pas suivre. Nous devons donc réclamer des processus de sélection des juges indépendants des forces politiques. Le gouvernement fédéral a commencé à mettre en place un tel processus, mais la continuité de ce dernier est loin d’être garantie. Même si le processus en place n’est pas parfait, il s’agit d’un premier pas dans la bonne direction. Nous devons insister sur la longévité d’un tel mode de sélection, et ce indépendamment de qui est élu à Ottawa. De plus, même si le gouvernement québécois est responsable de moins de nominations, nous devons militer pour un processus semblable dans la province.


Donc, en adoptant des réformes qui concrétisent l’indépendance politique des tribunaux, nous permettons aux juges de prendre de bonnes décisions, et ce en utilisant les sources juridiques et non l’opinion publique. Nous devons également nous méfier des politiciens qui essaient de concrétiser leurs positions politiques au sein des tribunaux.


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