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Dardia Joseph

I got 99 problems, mais je refuse que « le fit » en soit un




Réponse imparfaite à l'article de Vicente Guzman Barra, le « fit » est un privilège de classe » publié le 23 mars dernier dans le Pigeon Dissident



Précision # 0 : L’autrice a choisi de retenir la judicieuse proposition orthographique de Hubert Nunes quant à la graphie du terme « course au stage ».

Disclaimer # 1 : L’autrice a fait sa course au stage en 2019-2020.

Disclaimer # 2 : L’autrice a obtenu un stage lors de ladite course au stage 2019-2020.

Disclaimer # 3 : trêve de disclaimer.


Ceci n’est pas un reproche. Ceci est une ébauche parcellaire de réflexion que je porte depuis au moment. Une bouteille jetée à la mer parmi tant d’autres.


Le texte de Vicente est venu remuer quelque chose en moi. Un fond de kérosène qui sommeillait là, quelque part, dans les échancrures de mes veines. Sans vouloir nier la légitimité des préoccupations de quiconque, je voulais montrer que ce refrain pouvait se chanter sur un autre tempo.


D’ailleurs, petit aparté pendant que j’y suis , j’ai toujours été fascinée d’à quel point on entretient une dissonance sur ce qu’est la pensée dominante au sein de la Faculté. J’ai l’impression que tout le monde ressasse sans cesse les mêmes rengaines, en pensant être dans le camp des dissidents.


Le propre de tous et chacun devient donc de croire que, lorsqu’il parle, c’est au nom d’une minorité silencieuse, craintive d’exprimer son impopulaire opinion face au spectre d’une majorité qui lui serait réfractaire. #Food for thought


Déjà, il faudrait se décider. Le « fit » est à géométrie variable OU il est un moule immuable auquel tous.tes doivent se conformer; « un trou que l’on ne peut pas demander de modifier ». Ces deux énoncés sont mutuellement exclusifs. Sur une échelle non quantique, « le fit » est donc clairement soit l’un, soit l’autre.


De deux, peu importe ce que le « fit » est, pour moi, ce n’est pas important.


Pourquoi? Parce que j’aime imaginer que mon identité personnelle est une immense étendue d’eau, mouvante et fluctuante. En son sein, coexistent le tumulte des tsunamis et le calme des langueurs océanes. Sa nature reste inhéremment la même, mais sa forme peut changer.


Become like water my friend, disait l’autre. Shapeless, formless like water.


Mais bon, après, évidemment chacun est libre de concevoir son identité comme il l’entend. L’important, c’est le respect de soi. Savoir distinguer l’appréhension d’un milieu inconnu – l’inconfort que l’on ressent devant ce qui nous est infamilier – des moments où l’on a atteint nos limites. Ainsi, je n’exclus pas l’idée que certains milieux ne correspondront pas à mes valeurs ni à la personne que je suis, je crois simplement que c’est une preuve empirique qui doit me permettre de les identifier et non pas mes a priori.


« les exigences du code mettent à mal une grande majorité d’immigrants, de femmes et d’autochtones (et autres que j’oublie sûrement, je m’en excuse) qui ne peuvent pas performer avec autant d’aisance dans ces événements à caractère culturel. »


Peu de choses nous sont dues en ce bas monde et celui d’être mis à l’aise, malheureusement, n’en fait pas partie. Dans mon esprit, si le milieu que je veux intégrer est hospitalier, tant mieux. S’il ne l’est pas, tant pis.


If you don’t have a seat at the table, bring your own chair. Or, leave, and build your own table. Et pis, that’s it.


La beauté des codes c’est que, comme toute chose, ils s’apprennent. J’accepte d’être parfois en décalage. Je suis très consciente que ce n’est certainement pas toujours facile. Mais de là à accoler une étiquette à certains groupes – au mépris du fait qu’ils sont composés d’individus aux réalités distinctes – pour ensuite conclure comme si cela allait de soi, qu’ils « ne peuvent pas performer avec autant d’aisance »…


Alors ça, non.


Il y a une limite au fatalisme et aux généralisations abusives. Pour ma part, je refuse de voir les intersectionnalités de mon identité comme un fardeau. Je préfère les célébrer pour ce qu’elles sont : de véritables richesses qui me permettent de naviguer dans le plus d’espace possible.



Emancipate yourself from mental slavery. None but yourself can free your mind.


Si j’avais eu un dollar pour toutes les fois qu’on m’a dit qu’un stage en cabinet ce n’était « tellement pas mon vibe » et trois autres pour toutes les occasions que j’ai failli y croire, j’aurais été millionnaire.


Trop souvent, nous dressons nous-mêmes les barreaux de nos prisons intérieures.


Ainsi, « alors que la structure contraint l’action humaine. C’est de façon quasi-paradoxale que c’est à travers l’action humaine que l’on arrive à maintenir ou modifier les structures préétablies ».


Ça, c’est pas moi qui le dis. Ça vient de ma petite sœur. Je trouve ça brillant.



***********************


Sur une autre note, j’ai jamais compris la pratique du sport communément appelé ski. Aka se tenir en équilibre instable sur des bouts de bâton quelque part au Mont-Tremblant #shotsfiredMaximilien Sauvé-Bourassa.


Je bois pas. Je ne regarde ni le hockey, ni le soccer.


Le rapport ?


Justement. Il n’y en a pas.


Qu’ont en commun une historienne de l’art, un féru d’assurances, un passionné de fiscal et une étudiante qui hésitait entre droit et création littéraire ?


Rien. Excepté le fait qu’ils sont tous des étudiants chez Lavery.


Avant les habitus de classe, les codes de « l’élite » et les référents culturels soi-disant inaccessibles, en tant qu’être humain, on est unis par des valeurs qui nous permettent de tisser des liens entre les êtres sensibles que nous sommes.



La course au stage, privilège de classe ? Privilège d’hommes blancs ?


Mais quel homme blanc ? J’éprouve un malaise à réduire les identités des uns et des autres dans des blocs monolithiques abscons et fourre-tout.


D’autant plus que ces discours pavés de bonnes intentions peuvent involontairement avoir des effets pernicieux. En effet, lorsqu’on part avec des postulats aussi simplistes que « le ‘fit’ est un privilège de classe, ‘un privilège blanc et un privilège d’homme’ » on fait quoi avec les personnes marginalisées qui réussissent le tour de force de rentrer dans un « trou » qui ne leur était a priori clairement pas destiné ? Je veux dire des « blocs carrés » dans des « trous triangulaires », faut le faire quand même.


Ils ont des privilèges de classe ? Ils sont des bénéficiaires de discrimination positive ? À moins qu’ils constituent les exceptions qui confirment la règle ou qu’ils aient nié des portions d’eux-mêmes pour « ne pas déranger », question de « ne pas trop causer de malaises » ?


Rien de tout cela n’est exclu, mais, mine de rien, rien de tout cela est certain. Ils ont peut-être simplement été capables de s’épanouir au sein d’une entreprise ayant une culture qui rejoignait leurs valeurs. Et ça, je trouve que ça fait du bien de se le faire dire de temps en temps.


L’accès aux études supérieures est souvent le résultat d’un filtrage entamé des années plus tôt sur les bancs d’école. Je serai curieuse de savoir combien d’entre nous viennent de l’école privée ou de programmes enrichis. Nous sommes, pour la plupart, des produits directs de la culture de la performance. En tant qu’étudiant.es en droit, nous possédons donc tous des savoir-être, et des savoir-faire qui n’atteste en rien la valeur de notre caractère, mais qui nous empêchent, à mon avis, d’entrer dans une concurrence victimaire reliée au « fit ».


Mais bon, c’est peut-être plus facile de blame it on la course et les cabinets, question de continuer d’être woke à temps-partiel dans le confort du pavillon Maximilien-Caron.



Bref.


Alors, à toi, étudiant.es blanc.hes, racisé.es non-binaire.s, neuroatypique, en situation d’handicap. À toi, étudiant.es qui ne maîtrise pas tous les référents. À toi qui es trop tout ; pas assez à rien. Je te dis : fonces. Vas-y – si tu en as envie bien entendu.


Fais le maximum avec ce que tu as déjà et ne t’apitoie pas sur ce que tu ne possèdes pas. Travaille sur ce que tu peux contrôler et connais ce que tu vaux.


Celui qui passe sa vie à défendre ses convictions dans un milieu qui les partage s’affermit dans ses certitudes, mais celui qui prend le risque d’être bousculé dans sa vision du monde en ressort grandi. C’est promis !


Dardz


PS : Tu sais que c’est que du love mon cher Vicente :)


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